Les affaires sont les affaires (1903)

Chef-d’oeu­vre théâ­tral de Mir­beau, Les Affaires sont les affaires a été créée le 20 avril 1903 à la Comédie-Française, au terme d’une longue bataille, avec un suc­cès qui ne s’est jamais démen­ti lors des très nom­breuses repris­es de la pièce. En Alle­magne et en Russie, elle a con­nu égale­ment un triomphe.

UNE GRANDE COMÉDIE

Il s’ag­it d’une grande comédie de mœurs et de car­ac­tères qui se situe dans la lignée de celles de Molière : C’est une comédie, parce que, même si cer­taines sit­u­a­tions sont pathé­tiques, même si le dénoue­ment a été sou­vent qual­i­fié de « shake­spearien », on n’ou­blie jamais qu’on est au théâtre, et le spec­ta­teur est dis­tan­cié le plus sou­vent par les effets de grossisse­ment, par la ten­dance à la car­i­ca­ture et par les répar­ties cocass­es ou cinglantes d’Isidore Lechat, véri­ta­ble bête de théâtre qui fait mouche à tout coup. On rit donc beau­coup.
• C’est une comédie de mœurs, car Mir­beau ne s’est pas con­tenté de met­tre en scène des per­son­nages éter­nels, intem­porels, mais il les a situés à une époque pré­cise et a fait de sa pièce une pein­ture des mœurs con­tem­po­raines. Isidore Lechat, prodigieux brasseur d’af­faires, est « un per­son­nage nou­veau d’un monde nou­veau ». Tout en con­ser­vant «un fond d’hu­man­ité générale », il est « un type d’au­jour­d’hui », pro­duit d’une société gan­grenée par l’ar­gent.
• C’est une comédie de car­ac­tères, dans la mesure où Mir­beau a eu le souci de présen­ter des êtres vivants, humains, com­plex­es, déchirés par des con­tra­dic­tions, qui tranchent avec les habituelles mar­i­on­nettes du théâtre de boule­vard et du théâtre d’idées. Il refuse tout manichéisme et inter­dit les juge­ments sim­plistes et réduc­teurs. Ain­si, Isidore Lechat est à la fois génial et d’une prodigieuse clair­voy­ance en affaires, et débile et aveu­gle dans sa vie privée ; il est révoltant en tant que sym­bole social de l’om­nipo­tence homi­cide de l’ar­gent, mais pitoy­able en tant qu’être humain capa­ble de souf­frir. . Elle est dans la lignée de Molière, parce que Mir­beau renoue avec un cer­tain clas­si­cisme, tâche de trou­ver un équili­bre entre les néces­sités du théâtre et le souci du réal­isme, entre le rire et l’é­mo­tion, entre l’i­den­ti­fi­ca­tion et la dis­tan­ci­a­tion du spectateur.

LA PUISSANCE DE L’ARGENT

À tra­vers le per­son­nage d’Isidore Lechat, Mir­beau entend stig­ma­tis­er la dan­gereuse dérive d’une société mori­bonde où règne le culte du Veau d’or. Le titre, poly­sémique, sig­ni­fie que l’ar­gent exclut toute sen­si­bil­ité, toute pitié, toute sol­i­dar­ité, toute vie affec­tive, toute valeur morale, tout sen­ti­ment esthé­tique, et qu’il cor­rompt tout : les intel­li­gences, les cœurs et les insti­tu­tions. Der­rière une affaire finan­cière, il y a tou­jours une sale affaire ; et les affaires qui per­me­t­tent à des escrocs sans scrupules d’ac­cu­muler des mil­liards mal acquis ne sont jamais que du gangstérisme légal­isé. Car, dans un monde soumis au mer­can­til­isme général­isé, l’ar­gent garan­tit l’im­punité et per­met de tout acheter : le pou­voir poli­tique, la presse, la « jus­tice », les hon­neurs, les con­sciences, les tal­ents, bref la puis­sance sociale et la respectabil­ité morale.
Cette pein­ture au vit­ri­ol du monde des affaires n’a rien per­du de son actu­al­ité. Sim­ple­ment, aujour­d’hui, le cap­i­tal amassé par les Lechat est encore plus con­sid­érable, leur puis­sance économique est décu­plée, et ils ne con­trô­lent pas seule­ment la Bourse et la presse, mais aus­si des télévi­sions, des clubs de foot et des par­tis poli­tiques, ce qui leur per­met de con­cen­tr­er en leurs mains tous les pouvoirs.

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Les mauvais bergers (1897)

Les mauvais bergers (1897)

Les Mau­vais berg­ers est un drame en cinq actes et en prose, créé le 14 décem­bre 1897 au théâtre de la Renais­sance, par Sarah Bern­hardt et Lucien Gui­t­ry, les deux plus grandes stars du théâtre de l’époque. Elle a paru en vol­ume chez Fasquelle en mars 1898

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